Les mots de la semaine : « Lust & Last »

La nouvelle exposition du Nationalmuseum (24 mars — 14 août) s’intitule « Lust & Last » et aborde les thèmes de la nudité, de l’érotisme, de la sexualité, et surtout du regard sur ces thèmes-là à travers cinq siècles d’art.

Le mot « lust » signifie, de manière générale, « envie, désir » et « last » veut dire « défaut ». Pour traduire le titre de l’exposition en français, je choisis (comme pour le film « Des hommes et des dieux ») d’inverser les deux termes car cela sonne mieux : « Vice et luxure ».

L’exposition montre quelques 200 objets : peintures, dessins, sculptures, objets d’art, et même une ceinture de chasteté. Parmi les peintures, on retrouve des sujets bibliques ou mythologiques très connues qui étaient l’occasion pour les peintres des siècles passés de montrer des femmes (surtout) et des hommes plus ou moins nus, dans le but de moraliser autour des thèmes des vertus et des pêchés.

Diaporama présentant l’exposition

Le Nationalmuseum a une grande collection de dessins, et parmi eux, de nombreux dessins érotiques voire largement pornographiques. À la différence des peintures d’histoire mythologiques ou bibliques, ces dessins n’étaient pas censés être présentés à un large public. Johan Tobias Sergel et Carl August Ehrensvärd décrivent des scènes sexuelles cocasses où la fantaisie ne semble pas avoir de limite. L’une de mes préférées est celle qui montrent une demi-douzaine de fessiers féminins alignés qu’un homme s’apprête à chevaucher et dont la légende dit « Gör alla rätt! » = « Fais comme il faut ! » 🙂 (Si quelqu’un a une meilleure traduction, je suis preneuse.)

Une autre petite peinture montrant une religieuse agenouillée et priant amuse bien lorsque l’on regarde l’envers du tableau : en effet, elle a les jupes relevées et découvre ses fesses bien rondes. Du coup, l’homme qui la regarde sur la face du tableau, à l’arrière-plan, prend une toute autre dimension ! 🙂

On ne peut faire une telle exposition sans aborder le thème de la morale à travers les temps. Un phénomène intéressant est par exemple le fait que l’on dota, au cours du XVIIème siècle, pratiquement toutes les sculptures, contemporaines et anciennes, de feuilles de vigne pour dissimuler ce que l’on jugeait comme indécent. Les grecs et les romains n’étaient pas si prudes. 😉


Reportage de la télé suédoise

Les œuvres d’art contemporaines qui ont été empruntées pour cette exposition commentent, de manière moins équivoque que les œuvres anciennes, le thème du regard sur la nudité. Une de mes amies m’a raconté à quelle point elle se sentait mal à l’aise lorsqu’elle visitait l’exposition, non pas par les œuvres, mais par le regard que des hommes portaient sur elle quand elle regardait les œuvres en question. Une autre manière de dire que rien n’a beaucoup évolué…

L’exposition est ouverte à tous, le musée n’a pas la prétention de vouloir faire la distinction entre ce qui est bon ou mauvais, décent ou indécent. Mais on prévient les parents qu’ils peuvent être amenés à répondre à quelques questions embarrassantes posées par leurs enfants. 😉

Un panneau à l’entrée de l’exposition prévient que quelques œuvres peuvent être choquantes. Personnellement, aucune des œuvres classiques ne me choquent, ni les œuvres contemporaines qui traitent entre autre de la masturbation (féminine par un artiste-homme ou masculine par une artiste-femme). Ce qui me choque, c’est plutôt le fait qu’on ait, pendant des siècles, porté un regard réprobateur et culpabilisant sur la nudité des femmes — jamais celles des hommes. Le commentaire d’un portrait représentant Lucrèce, rappelant qu’elle fut violée et, se sentant coupable, se suicida, me met par exemple hors de moi. Il n’y a pas longtemps, un groupe d’hommes suédois ayant abusé sexuellement d’une adolescence handicapée mentale ont été libérés de tous soupçons sous prétexte que la jeune fille n’avait pas suffisamment résisté… Cela n’a rien à voir avec l’art, mais bien avec le regard que l’on porte, encore de nos jours, sur la nudité et la sexualité.

Pour ce qui est de la ”déclinaison” de ces deux mots, je choisis de les traduire dans leur sens plus général, sans la connotation morale.

en lust [ène luste] = une envie, un désir

lusten [lustène] = l’envie, le désir

lustar [lustare] = des envies, des désirs

lustarna [lustarna] = les envies, les désirs

L’expression « jag har lust att … » = « j’ai envie de … » est courante.

en last [ène laste] = un défaut

lasten [lastène] = le défaut

laster [lastère] = des défauts

lasterna [lastèrna] = les défauts

Le thème de la semaine : bureau

Un thème par semaine et mon appareil photo prend l’air 52 fois par an !

Pour les besoins du thème de la semaine, j’ai mis un peu d’ordre sur mon bureau : il fallait bien que ce soit un tant soit peu présentable. 😉

Mon bureau est ergonomique avec une table réhaussable, pour pouvoir travailler assise ou debout, un fauteuil confortable, pas de souris mais un pavé tactile, et un appui-bras pour soulager mes coudes.

Comme j’ai deux tâches de travail principales entre lesquelles j’alterne, j’ai mis en place deux classeurs et deux corbeilles à courrier. (La troisième corbeille est pour ce qui reste à faire sur l’exposition sur laquelle je travaillais jusqu’à début février).

Quelques objets personnels : des photographies et au premier plan, mes fruits pour la semaine et une partie de ma collection de thés. 🙂

Et puis une petite composition florale, vestige de l’inauguration de la nouvelle exposition du Nationalmuseum (dont je vous parlerais dimanche).

Le mot de la semaine : « bråka »

La vie n’est pas toujours toute rose. Cette semaine a été particulièrement difficile, ce que le mot de la semaine reflète bien. C’est un mot qui veut dire bien des choses, comme : briser, écraser ; raffiner (le pétrole par exemple) ; s’efforcer ; mais surtout : causer des problèmes ou des soucis, chercher querelle ou des noises, de manière bruyante et animée.

Deux de mes collègues s’en prennent à ma chef depuis plusieurs mois pour m’avoir diminuer mon temps de travail. Pour arriver à leurs fins, ils s’en prennent au fait que je fais partie du groupe prévention-santé, que je suis représentante syndicale, que je participe (quand j’ai le temps) aux visites guidées pour le personnel, et que je prends mes pauses (lesquelles je ne prends pas aussi régulièrement qu’auparavant d’ailleurs, mais ils ne semblent pas l’avoir remarqué…) Quand je demande en quoi cela gêne mon travail, ils ne peuvent présenter aucune preuve. Et j’ai finalement été accusée de faire du zèle pour obtenir un CDI à plein à temps et de faire tout mon possible pour devenir la chouchoute de la chef … Que j’affirme devant eux, et la chef, que j’ai déjà fais mes preuves et que je ne m’efforce pas particulièrement pour effectuer mes tâches de travail comme il se doit n’a aucune importance.

Je croyais au début qu’ils râlaient auprès de la chef pour obtenir d’elle que je travaille de nouveau à plein-temps, mais j’ai vite compris qu’ils m’utilisent en fait pour exprimer une frustration et une inquiétude non fondée face à l’avenir. Je finis même par croire que je dérange tout simplement car je suis appréciée de mes chefs et d’autres collègues.

Quand je repense à ma scolarité, il n’y a pas beaucoup de changement finalement. J’étais bonne élève (mais pas parfaite), obéissante et studieuse. Je n’étais pas insolente, je ne remettais pas en question l’autorité des professeurs, je n’ai jamais été une rebelle. Arrivée en Suède, je sais que cette éducation me colle à la peau, mais avec le temps, j’ai appris à argumenter, à remettre en question quand il en est besoin et à oser rester sur mes positions quand je suis convaincue de mes idées. C’est-à-dire que je ne me laisse pas piétiner n’importe comment, même si j’essaye de rester diplomatique, posée, professionnelle et rationelle. Et surtout je refuse de m’abaisser au niveau puéril de mes collègues quand ils ont décidé de « bråka ».

Heureusement, j’ai le soutien de ma chef, de la fonction RH et d’autres collègues. Cela m’a redonné un peu de force et je suis maintenant prête à attaquer une nouvelle semaine. Mercredi j’étais prête à jeter l’éponge, mais la nuit m’a portée conseil et je me suis réveillée jeudi matin avec un sentiment d’injustice : NON ! Ce n’est pas moi, qui aime mon travail et dont on est satisfaite, qui vais céder ! Je ne m’avoue pas vaincue si facilement. Non mais !

de bråkar [dome braukare] = ils causent des problèmes

de har bråkat [dome ‘hare braukate] = ils ont causer des problèmes

de bråkade [dome braukadé] = ils causaient des problèmes

de kommer att bråka [dome komeure ate brauka] = ils vont causer des problèmes

La semaine prochaine, j’espère pouvoir aborder un sujet plus joyeux. 🙂

Le mot de la semaine : « semla »

Mardi dernier, c’était la journée internationale des droits de la femme, la journée des crêpes et Mardi gras, soit le jour des « semlor » en Suède, ces petits pains au lait fourrés à la pâte d’amande et couronnée de crème fouettée.

Ils apparaissent dans les supermarchés dès après les festivités de Noël et du Nouvel An, et dans les pâtisseries et salons de thé peu après. Pour ma part, je me tiens à la règle traditionnelle : pas de « semla » avant Mardi gras. Puis je suis la tradition de ma belle-famille qui déguste un semla tous les mardis soirs, après la soupe, et ce jusqu’à Pâques.

Semlor

Comme chaque année, les journaux publient leurs tests de meilleurs « semlor » de Stockholm. Les résultats de ces tests m’ont toujours déçue quand j’ai cédé à la tentation d’acheter le « semla » gagnant. Mais je suis exigeante, je place la barre très haut dès le départ. Voici mes critères pour un bon « semla » : il doit y avoir de la cardamome dans la pâte, pâte qui ne doit pas avoir un aspect spongieux, le petit pain au lait doit être badigeonné d’oeuf battu, la pâte d’amande doit de préférence être mélangée à la mie du petit pain, la crème fouettée ne doit être trop sucrée. Résultat, je n’apprécie en général que les « semlor » fait-maison.

Semla au levain prêt-à-déguster

Mais cette année, un Stockholmois a relevé le défi de tester au moins un « semla » par jour entre le 1er février et le 8 mars et d’en faire la critique sur un blog qui a vite connu le succès. Il veut rester anonyme et a choisi pour pseudonyme « Semmelmannen » [sémèl(e)manène] (= l’homme aux « semlor »). Il étudie les « semlor » qu’il goûte de manière systématique et met des notes sur 5 pour l’apparence générale, le petit chapeau (qu’il préfère triangulaire et largement saupoudré de sucre glace), le petit pain, la pâte d’amande (qui doit contenir des morceaux d’amande) et la crème fouettée. La note finale est sur 5. Voici le palmarès final de Semmelmannen :

1. Tössebageriet, Karlavägen 77: 5/5

2. Xoko, Rörstrandsgatan 15: 5/5

3. Stinas bageri, Frejgatan 46A: 5/5

4. Söderbergs bageri, Telefonplan, Cedergrensvägen 55, Hägersten (banlieue de Stockholm) : 5/5

5. Bulleboden, Parmmätargatan 7: 4,5/5

Semlor de Xoko

Hier, je me suis offert le luxe de goûter aux « semlor » de Xoko (auxquel Semmelmannen a donné 5/5 partout sauf un 4/5 pour la pâte d’amande à cause de morceaux d’amande trop gros), un normal et un au chocolat. Il y avait du chocolat dans le petit pain, la pâte d’amande et dans la crème fouettée. C’était aussi bon qu’un chocolat chaud !

Semla au chocolat de Xoko

en semla [ène sèm(e)la] = un ”semla”

semlan [sèm(e)lane] = le ”semla”

semlor [sèm(e)lore] = des ”semlor”

semlorna [sèm(e)lorna] = les ”semlor”

Pour ma part, puisque je ne jure plus que par le levain, j’ai fait une fournée de « semlor » au levain dont je suis plutôt satisfaite. 🙂 Pour la recette, je me suis inspirée du blog de Sébastien Boudet, Brödpassion, qui tient la boulangerie-pâtisserie Petite France (mais je n’ai pas commis l’impair de remplacé la pâte d’amande par de la crème à la vanille !) ainsi que de celui de Joseph Fernando, Tankedegen. Si vous êtes intéressés par ma recette, cliquez sur ce lien.

« Semlor » au levain

Voici une recette adaptée pour faire des « semlor » au levain. Je me suis inspirée du blog de Sébastien Boudet, Brödpassion, qui tient la boulangerie-pâtisserie Petite France (mais je n’ai pas commis l’impair de remplacer la pâte d’amande par de la crème à la vanille !) ainsi que de celui de  Joseph Fernando, Tankedegen. Le fait d’utiliser du levain à la place de la levure boulangère donne des petits pains qui se tiennent encore mieux. La consistance rappelle un peu plus celle du pain que celle de la brioche. (La recette de base est ici.)
Ingrédients pour environ 30 petits pains au lait :

Le levain :

  • 50 g de culture de levain au froment
  • 210 d’eau tiède
  • 240 g de farine de froment

Les petits pains :

  • 3 dl de lait
  • 100 g de beurre
  • 5 g de cardamome, décortiquée et moulue au pillon
  • 1000 g de sucre
  • env. 750 de farine de froment
  • 10 g de sel marin
  • 1 œuf + 1 œuf pour badigeonner

La farce :

  • pâte d’amande râpée
  • crème fouettée
  • sucre glace

1. Préparez le levain la veille au soir dans un grand bol en métal en mélangeant bien tous les ingrédients et laisser lever au moins 8 heures.
2. Le lendemain, faites fondre le beurre dans le lait et chauffez jusqu’à obtenir un mélange tiède (environ 37°C).
3. Versez ce mélange sur le levain, puis ajoutez la cardamome, le sucre, l’œuf et la farine. Malaxez bien le tout pendant 4 min à basse vitesse si vous avez un robot, ou pétrissez au moins 10 min à la main.
4. Ajoutez le sel puis malaxez encore 4 min en augmentant un peu la vitesse. La pâte ne doit pas être trop compacte.
5. Versez la pâte dans une caisse en plastique préalablement enduite d’huile, couvrez d’un couvercle et laissez lever une à deux heures jusqu’à ce que la pâte ait doublée de volume.
6. Pour obtenir une pâte plus élastique, étirez-la et retournez-la de gauche à droite et de haut en bas, toutes les 30 min.
Pâte à semlor
7. Déposez la pâte sur votre plan de travail légèrement enfariné. Découpez la pâte en deux morceaux égaux, faites-en deux boudins régulier à partir desquels vous pouvez rouler des petits pains.
Former des semlor
8. Déposez-les sur une plaque de cuisson sur du papier sulfurisé ou un tapis en silicone. Couvrez-les d’un torchon propre et laissez lever encore une heure.
Semlor après la levée
9. Entre-temps, préchauffez le four à 225°C.
10. Badigeonnez les petits pains d’œuf battu avant de les enfournez et faites cuire environ 10 min, en fonction de la grosseur des petits pains.
Semlor en train de cuire
11. À la sortie du four, laissez les petits pains refroidir sur une grille à l’abri d’un torchon.
12. Congelez-les si vous ne pensez pas déguster vos « semlor » tout de suite.
Semlor
13. Avant dégustation, découpez un petit chapeau sur chacun des petits pains.
14. À l’aide d’une fourchette, ôtez la mie de la base du petit pain. Émiettez-la et mélangez-la à un peu de pâte d’amande râpée et liez le tout avec quelques gouttes de lait. Remplissez les petits pains de ce mélange.
Semla au levain prêt-à-déguster
15. Couronnez les petits pains de crème fouettée et couvrir des petits chapeaux.
16. Saupoudrez de sucre glace et servez immédiatement. Dégustez !
Semlor au levain prêt-à-déguster

Les mots de la semaine : « Gudar och människor »

Je suis allée au cinéma hier avec ma meilleure amie pour voir un film intitulé en suédois « Gudar och människor ». Ça fait un moment qu’il passe et nous ne voulions de risquer de le rater. En français, le titre est « Des hommes et des dieux ».  Traduit en suédois, il est inversé. Je trouve que c’est une bonne décision de traduction, cela sonne mieux comme ça en suédois.

« Gudar » est le pluriel de « gud ». Vous y reconnaissez sûrement le « god » englais ; c’est en effet un mot d’origine germanique : en allemand, c’est « gott », en danois et en norvégien, on dit aussi « gud », en islandais « guð » ou « goð ». Je ne serais pas étonnée si ce mot avait la même étymologie que l’adjectif « god, gott » en suédois, qui veut dire « bon ».

en gud [ène gude] = un dieu

guden [gudène] = le dieu

gudar [gudare] = des dieux

gudarna [gudarna] = les dieux

L’exclamation suédoise « herregud! » [‘hérégude] (où « herre » signifie « maître, seigneur ») correspond au « mon dieu ! » français. Les Suédois disent souvent « åh gud! » ou « nej men gud! » quand ils sont étonnés de quelque chose.

« Människor » est le pluriel de « människa ». C’est également un mot d’origine germanique : « menneske » en danois, « manneskja » en islandais, « mensch » en allemand, qui dérive qui substantif « man » = homme. Mais j’ai entendu dire que c’était aussi un mot d’origine indo-européen : il semblerait en effet que l’équivalent indien ressemble beaucoup au mot suédois. Intéressant !

en människa [ène mènicha] = un être humain

människan [mènichane] = l’être humain

människor [mènichore] = des êtres humains

människorna [mènichorna] = les êtres humains

Ce mot s’utilise souvent pour parler des gens en général, sans distinction de sexe. À noter néanmoins que l’on réfère à « människa » avec le pronom féminin « hon » = elle. Encore plus intéressant !

À part ça, j’ai trouvé le film très bien, avec un contenu dense, et bien filmé dans le sens où l’illusion du style documentaire est parfaite. Je ne suis pas croyante (je l’ai déjà dit…), mais j’ai ressenti beaucoup de respect envers ces moines trappistes de l’Atlas et la population musulmane du village pris en otage par le terrorisme. Le film aborde les sujets lourds tels que l’éthique, la responsabilité et la liberté de manière très compréhensible car issu d’un contexte réel. Il est impossible de ne pas ressentir de la sympathie pour les victimes du terrorisme. J’avoue même avoir versé quelques larmes lors de scènes très émouvantes. Lambert Wilson joue très bien son rôle de prieur, mais celui que j’ai préféré dans ce film est Michael Londasle, qui a d’ailleurs remporté le César du meilleur acteur dans un second rôle.