Fotografiska

En l’espace de quelques années, deux nouveaux lieux d’expositions privés ont vue le jour, dans des bâtiments impressionnants, j’ai nommé Artipelag (en 2012) situé à Gustavsberg dans un milieu naturel magnifique, été comme hiver, et Fotografiska (en 2010) à deux pas de Slussen, avec une vue imprenable sur l’eau, la Vieille Ville, Skeppsholmen et Kastellholmen. Ce ne sont ni des musées dans le sens où ils n’ont pas de collections d’art, mais ni des galeries puisque les œuvres exposées ne sont pas à vendre.

Fotografiska Entrée du Fotografiska

Je vais souvent au Fotografiska, car il est très facile d’accès et qu’il propose de nombreuses expositions. Les horaires d’ouverture du Fotografiska sont aussi plus généreuses (dimanche—mercredi 9h-21h, jeudi—samedi 9h-23h) et l’entrée un peu moins chère (120 kr) qu’à Artipelag. Ces deux dernières années, je me suis procurée la carte à l’année (pour 495 kr) qui me permet d’y rentrer gratuitement (et de plus me donne 10 % au restaurant, des réductions dans la boutique et 5 % sur les cours de photos — le jour où je m’offrirai ce luxe).

Vue depuis le Fotografiska Vue depuis le Fotografiska

Au Fotografiska, il y a toujours deux à quatre expo-photo en même temps (à part la fois où David LaChapelle monopolisa les trois étages de cet ancien bâtiment des douanes), ce qui fait qu’il y a toujours quelque chose qui me plaît. Depuis l’ouverture, il y a eu une trentaine d’expositions de caractères très différents : photo classique, de mode, documentaire, ou plus commerciale, noir & blanc, couleur, des paysages, des portraits humains et animaux, ”photoshopés” ou pas, des photographes plus ou moins connus, de différentes nationalités … Le programme est étendu, la qualité varie. Mais le plus important pour moi est de me faire l’œil, d’apprendre, et d’être éventuellement inspirée. (Je me moque qu’une partie de l’ ”élite culturelle” stockholmoise critique le Fotografiska pour ne pas exposer des œuvres originales et faire des expos dans le seul but d’attirer du public.)

 Exposition Cartier Bresson

J’y étais le week-end dernier car c’était les derniers jours pour l’exposition de Paolo Roversi, un photographe de mode italien. La plupart de ses photos ont quelque chose de mystérieux en elles. Je ne trouvais pas qu’il s’agissait de photos de mode à proprement parlé, du moins pas telles que nous sommes habitués à les voir sur les affiches publicitaires ou dans les magazines, elles sont un peu plus artistiques. En même temps, je trouvais qu’il y avait un peu trop de nus, mais ce que me dérangeais le plus était en fait la minceur des modèles. Une série de nus debout m’a plu sur le plan esthétique — comme si les contours des corps avaient été dessinés au crayon sur papier d’aquarelle blanc — mais elle était si longue que ça m’a fait pensé au fétichisme et m’a mis un peu mal à l’aise. J’ai eu le même sentiment mitigé pour la série autour du modèle Natalia : dans un portrait isolé, on voit une fille aux grands yeux farouches, mais on comprend plus tard avec les autres photos qu’il s’agit en fait d’une femme adulte. Roversi fait aussi des photos qui font penser aux années 1920 : elles sont un peu plus oniriques, un peu nostalgiques d’un temps perdu, mais que le photographe peut re-créer à l’aide d’un éclairage tamisé.

 Exposition Paolo Roversi

Il y avait trois autres expositions ce week-end-là.

L’une traitait du printemps arabe et montrait des photos que Paul Hansen, Roger Turesson, Anders Hansson et Thomas Karlsson, photographes au journal Dagens Nyheter, ont pris en Tunisie, Syrie, Libye, Égypte, Bahrain et au Yémen ces trois dernières années. Des photos qui témoignent du chaos, du désespoir, de la douleur et du chagrin mais aussi de l’espoir et de la croyance en l’avenir.

Exposition Printemps arabe

L’autre montrait des photos de Jill Greenberg : des portraits d’enfants en pleurs, d’ours, de chevaux et de singes. Ses photos sont à mes yeux trop retouchées, la lumière est trop forte et résultent en un hyperréalisme qui n’est plus crédible. Je ne veux pas dire par là que la crédibilité fait forcément de la bonne photo, mais dans ce cas précis, j’ai trouvé que ça allait un peu trop loin.

Exposition Jill Greenberg

 

La dernière exposition (que j’ai en fait vue en premier) était celle que j’ai préférée : des photos en noir et blanc d’Elliott Erwitt, un peu dans le style de Cartier-Bresson (comme la photo de l’homme sautant au-dessus d’une flaque d’eau avec la Tour Eiffel en arrière-plan), mais avec pleins de petits clins d’oeil.

Exposition Elliot Erwitt

Certaines photos étaient vraiment marrantes et portaient en même temps à réflexion : des visiteurs au château de Versailles qui semblent plus intéressés par un tableau qui manque sur le mur que par ceux qui y sont; un groupe d’hommes dans un musée espagnol devant un tableau avec une femme dénudée, alors qu’une femme seule regarde la même femme habillé sur le tableau d’à côté ; un groupe d’hommes et de femmes nus qui dessinent un modèle habillé, etc. Mais Erwitt a surtout l’œil pour le petit détail qui donne toute sa qualité à une photo : le corps d’un héron dont la forme répond à celle d’un robinet ; un éclat sur une vitre de voiture qui couvre l’œil sur un visage de garçon ; deux courges bien placées comme pour ”remplacer” la poitrine de la femme assise derrière ; le grand caniche qui se tient debout sur les pâtes arrières de la même manière que son maître ; l’homme avec la figure de bouledogue français sur l’escalier d’une maison. Erwitt a aussi fait des photos un peu plus sérieuses (comme celle avec les lavabos réservés aux blancs et aux noirs, ou Jackie Kennedy à l’enterrement de JFK) ou romantiques (le reflet du couple s’embrassant dans le rétroviseur). Ma photo préférée est celle de la femme chapeautée se tournant vers les gratte-ciels de New York. Et j’aime aussi son approche de la photographie comme art et moyen d’expression.

Citation Elliott Erwitt Citation Elliott Erwitt

 

Expositions en cours:

The Arab Spring, Fotografiska for life & Dagens Nyheter, jusqu’au 28 janvier

Jill Greenberg, Works 2001-2011, jusqu’au 9 février

Elliott Erwitt, 100+1, jusqu’au 2 mars

 

Expositions à venir :

Johan Rheborg, Backstage, 17 janvier—9 mars

Corinne Mercadier, Wicked Gravity, 17 janvier—9 mars

Pieter ten Hoopen, Testimonies from the North Caucasus, 30 janvier—23 février

Julia Fullerton-Batten, Staged Reality, 14 février—4 mai

 

Version suédoise ici

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