Les processions de la Sainte-Lucie le 13 décembre sont devenues une institution dans les écoles et sur les lieux de travail. En tête une Lucia, une fille vêtue d’une longue chemise blanche et d’une ceinture rouge autour de la taille, les cheveux longs et blonds (ça commence à changer au fur et à mesure de la diversification de la population suédoise et c’est tant mieux), portant sur la tête une couronne des bougies. Après elle, viennent des filles et des garçons d’honneur, eux aussi en longues chemises blanches et couronnes de feuilles ou guirlandes argentées dans les cheveux. Dans les processions des écoles maternelles et primaires, on voit aussi des enfants déguisés en pain d’épices ou en lutins.
Cette année, la directrice d’une école suédoise décida que la procession de la Sainte-Lucie ne contiendrait pas ces bonhommes en pain d’épices et autres lutins, seulement des filles et des garçons d’honneur. Tollé général parmi les parents ! L’un d’entre eux affirmant même que son garçon refusait d’enfiler une robe (la longue chemise — quelle ouverture d’esprit…) Beaucoup d’autres personnes se sont engagés à ce sujet, entre autres sur internet, et ont critiqué la directrice de porter atteinte à une belle et vieille (de 100 ans seulement) tradition suédoise. Le fait est que les bonhommes en pain d’épices et autres éléments colorés dans la procession de la Sainte-Lucie sont en fait des apports tardifs et locaux. L’intention de la directrice était un retour aux sources pour apprendre ainsi aux enfants le sens de cette tradition. Elle voulait donner à cette procession un sens pédagogique, mais se heurta à la colère et l’ignorance du peuple.
Ceci démontre parfaitement comment tous les discours sur les traditions et ce que c’est d’être suédois souvent partent dans la mauvaise direction. Il n’est pas rare que ceux qui parlent de tradition et de nationalité n’aient en fait aucune idée de ce que ces notions signifient. Ce genre d’événements devrait leur faire comprendre que tradition et nationalité ne sont des phénomènes statiques mais qu’au contraire ils évoluent et s’enrichissent de détails venant de différentes origines. Et qu’il n’y a rien de dangereux là-dedans.
Mais la directrice, courageuse et inébranlable, tint bon. Aux parents en colère de ne pas avoir été consultés sur la question, elle répondit qu’ils sont rarement consultés dans tout ce qui touche à l’école. L’école n’est pas la responsabilité des parents, tout comme l’éducation des enfants n’est pas la responsabilité de l’école. De plus, je suis sûre que les parents s’engageraient de toutes manières très peu si on les consultait. Mais pour la procession de la Sainte-Lucie, ils répondent étrangement tous présents… Au point qu’on en arrive à se demander pour qui cette procession est : les enfants ou les parents ?
Version suédoise ici
En reaktion på ”Touche pas à ma procession de la Sainte-Lucie !”