Deux ans de travail, dont un mois de montage acharné, ont abouti à une exposition grandiose, magnifique, époustouflante ! « Härskarkonst » en suédois, «Staging Power » en anglais, « Arts du pouvoir (ou des pouvoirs) » en français ou encore, comme l’écrit l’ambassade de France à Stockholm, « Le Pouvoir en Scène ». Le sous-titre est « Napoléon — Charles Jean — Alexandre », faisant ainsi référence aux trois souverains contemporains du premier empire français.
Les journaux parlaient de l’exposition avant même qu’elle ouvre. Les attentes sont élevées, les premières critiques sont bonnes, le suspens est presque intenable : on veut savoir ce que les gens en pensent, en bien ou en mal. J’ai hâte de connaître les chiffres de visite de ce premier week-end !
Cette dernière semaine a été celle des derniers détails, des dernières corrections (même on trouve encore des erreurs …), avant l’inauguration officielle le 29 et les vernissages pour le grand public le 30 septembre.
« Inviga » veut dire inaugurer ; « en invigning » est une inauguration.
han inviger [‘hane in(e)vigeure] = il inaugure
han har invigt [‘hane ‘har in(e)vig(e)te] = il a inauguré
han invigde [‘hane in(e)vig(e)dé] = il a inauguré
han ska invinga [‘hane ska in(e)viga] = il inaugurera
Mais qui est-il ? Sa Majesté le roi de Suède en personne, Carl XVI Gustav, puisqu’il patronne l’exposition et est un des prêteurs les plus importants avec une soixante d’objets (l’exposition en compte un peu plus de 400 au total). Oui, c’était « en kunglig invigning » [ène kungligue in(e)vigningue], une inauguration royale avec discours de la conservatrice en chef du musée, Solfrid Söderlind, du commissaire de l’exposition, Magnus Olausson (traduit en russe par ma collègue, puis en français par moi car il y avait des invités russes et français), puis du roi lui-même.
Pendant que le roi et la reine de Suède visitaient l’exposition au calme, avec une suite de quelques dizaines de personnes, le reste des invités socialisaient et papotaient dans l’escalier majestueux du Nationalmuseum, un verre de Dom Pérignon en main, avant de pénétrer dans les salles d’exposition.
Deux heures plus tard, après le départ des têtes couronnées, l’inauguration étaient suivie d’un dîner de gala, offert par l’un des sponsors, Moët Hennessy. Le menu ne pouvait en être que luxueux : conçu par Patrice Karlsson, chef de cuisine du restaurant du Nationalmuseum, et Pascal Tingaud, chef de cuisine Dom Pérignon, celui-ci mêlait des traditions historiques gastronomiques françaises et suédoises. Jugez plutôt :
Potage de haddock et crevettes grises à l’aneth
Un plat traditionnel suédois du XIXème siècle.
Pour le dîner, un potage était toujours servi en entrée.
Le haddock était un poisson très apprécié à la cour de Suède.
Dom Pérignon Vintage 2000
Selle de chevreuil, sauce poivrade, croûton de farce fine,
mousseline de céleri, pommes, cumberland et cèpes
Pays de tradition cynégétique, la Suède et la France
ont toujours servi de la venaison sur les tables royales et impériales.
Le sucré-salé a fait son apparition sous l’Empire.
C’est Bernadotte qui a fait connaître les cèpes en Suède
qui portent dans le pays le nom de Karl Johan.
Cheval des Andes 2006
Fromages, abricots secs, figues séchées, amandes et noix
Fromage de brebis de la vallée d’Ossau dans les Pyrénées,
région du Sud-Ouest de la France d’où Bernadotte était originaire.
Fromage de Suède ”Hammarby Blå” de la région de Roslagen.
Château d’Yquem Millésime 1998
Blanc-manger aux poires, pommes au four et glace à la vanille
Le blanc-manger est un plat classique de la cuisine sous l’Empire.
Carême (cuisinier de Talleyrand et de Napoléon, puis du tsar de Russie)
l’adapta pour le tsar en y ajoutant des poires.
L’arrivée de Bernadotte en Suède
a coïncidé avec l’introduction des glaces lors des repas
Sauternes, premier cru supérieur 1855
Café, thé
Hennesy Paradis (cognac)
Le repas était tout simple divin ! (Ma seule petite critique : les fruits séchés accompagnant le fromage semblaient tout droit sortis de leur sachet …) La compagnie à table était agréable et polyglotte : deux journalistes françaises, un diplomate suédois rattaché au consulat de France de Göteborg, une designer suédoise, un attaché culturel français, un premier maréchal de cour suédois, et une petite assistante d’exposition franco-suédoise. 😉
L’invité de première classe de la soirée était l’ancien président de la République, Valéry Giscard d’Estaing (proche de Moët Hennesy), qui n’a pas pu s’empêcher d’y aller de son petit discours, en anglais s’il vous plaît !
De telles fêtes sont extrêmement rares au Nationalmuseum — une telle exposition n’avait pas eu lieu depuis 12 ans ! — alors je pouvais bien me payer le luxe de me faire coiffer en ville pour être présentable à l’heure H. 🙂