En 2015, la Suède se dotera de nouveaux billets de banque. Un concours a été lancé pour leur design graphique et le résultat a été présenté le 24 avril dernier.
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en sedel [ène sédèle] = un billet
sedeln [sédèl(e)ne] = le billet
sedlar [sédlare] = des billets
sedlarna [sédlar(e)na] = les billets
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Aujourd’hui, les billets actuels ont les valeurs suivantes : 20, 50, 100, 500 et 1 000 couronnes, et sont en circulation depuis les années 1980-1990.
Sur le billet actuel de 20 couronnes, on voit Selma Lagerlöf (1858-1940), gravée après une photographie prise dans l’atelier Jaeger en 1922. Selma Lagerlöf est une des auteures suédoises les plus connues de part le monde et fut la première femme à figurer sur un billet suédois. Elle obtenu le prix Nobel de littérature en 1909 et siégea à l’Académie suédoise à partir de 1914. Sur le recto du billet de 20 couronnes, on voit aussi le début de son premier roman, La légende de Gösta Berling. Au verso, Nils Holgersson survole les plaines scaniennes sur le dos de l’oie Mårten.
Sur le billet de 50 couronnes figure la cantatrice Jenny Lind (1820-1887), surnommée le ”rossignol suédois”, d’après une litographie d’environ 1845, et les notes de l’opéra Norma composé par Bellini. Au recto un paysage suédois stylisé et une « silverbasharpa », une sorte de « nyckelharpa ».
Sur le billet de 100 couronnes, on retrouve le botaniste Carl von Linné (1707-1778), connu à travers le monde entier pour avoir lancé les bases d’une nomenclature végétale. Le portrait gravé sur le billet reprend celui du non moins connu peintre Alexandre Roslin (1718-1793), et côtoie des dessins de plantes issues de son œuvre de jeunesse Præludia Sponsaliarum Plantarum (1729). Au recto, on a voulu illustrer l’héritage de Linné dans le monde scientifique avec une abeille en train de polliniser une fleur, d’après des photos du Lennart Nilsson. (Linné n’avait visiblement jamais compris le rôle des abeilles …)
C’est le roi Charles XI (1655-1697) qui trône sur le billet de 500 couronnes, d’après un portrait peint par le peintre de cour David Klöcker Ehrenstrahl (1628-1698) lors de la bataille de Lund en 1676 (entre la Suède et le Danemark). C’est sous son règne que fut créée la Banque de Suède (« Sveriges riksbank ») et c’est pourquoi le bâtiment figure également au verso. Au recto, on peut voir un portrait de Christopher Polhem (1661-1751), le père de l’industrie suédoise, d’après un portrait peint en 1741 par Johan Henrik Scheffel (1690-1781) ; à l’arrière-plan, la roue d’engrenage de Stjärnsund et les mines de cuivre de Falun en Dalécarlie.
Sur le billet de 1 000 couronnes, encore un roi : Gustav Vasa (1496-1560), d’après un portrait peint dans les années 1620 par Cornelius Arendtz (env. 1590-env. 1655). C’est Gustav Vasa qui rendit la monarchie suédoise héréditaire (auparavant, les rois étaient élus) et instaura le protestantisme comme religion d’état (pour mettre la main sur les biens de l’église catholique). La dynastie Vasa resta sur le trône de Suède jusqu’à l’abdication de la reine Christine en 1654. À l’arrière de Gustav Vasa, on peut voir le « Vädersolstavlan » qui est aujourd’hui visible à Storkyrkan, dans la Vieille Ville de Stockholm, et qui représente une parhélie, qui eut lieu le 20 avril 1535 à Stockholm. Ce tableau est la plus ancienne image de Stockholm existant. Au recto de « tusenlappen », une scène de moissons illustre un passage de Historia de gentibus septentrionalibus (Histoire des peuples du nord) d’Olaus Magnus, datant de 1555. Olaus Magnus fut le dernier évêque catholique en Suède. Son œuvre écrite est considérée comme une des sources les plus importantes pour ce qui est de la géographie, de la culture et de l’histoire de la Suède du XVIème siècle.
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Au quotidien, on désigne souvent ces billets par leur valeur suivie du mot « lapp » = morceau de papier :
en lapp [ène lape]
lappen [lapène]
lappar [lapare]
lapparna [lapar(e)na]
en tjugolapp [ène chugolape] = un billet de 20 kr
en femtiolapp [ène femtiolape] = un billet de 50 kr
en hundralapp [ène ‘hunedralape] = un billet de 100 kr
en femhundralapp [ène fèm‘hunedralape] = un billet de 500 kr
en tusenlapp [ène tusènelape] = un billet de 1 000 kr
Pour les billets de 100 et 500 kr, on peut aussi dire : « en hundring » [ène ‘hunedring] et « en femhundring » [ène fème’hunedring].
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La nouveauté parmi les nouveaux billets à venir, c’est : une modernisation des motifs (disparition des rois, toutes les personalités ont vécu au XXème siècle), la prédominance du thème culurel (une écrivain, un chanteur-troubadour, une actrice, un régisseur, une chanteuse d’opéra et un diplomate) ainsi que l’introduction du « tvåhundring », billet de 200 couronnes. Chaque personnalité est doublée au verso d’un paysage accompagné de sa fleur emblématique.
Longtemps, les Suédois ont voulu voir leur écrivain préférée, Astrid Lindgren, (1907-2002) figurer sur un billet ; c’est maintenant chose faite : elle est en effet devenue la figure de proue du billet de 20 couronnes. Au recto, un paysage de Småland, région de laquelle est originaire la créatrice de Fifi Brindacier et Zozo la tornade, et une linnée boréale.
Evert Taube (1890-1976), qui chanta la mer, la nature, les paysages suédois et bien sûr l’amour, ornera les billets de 50 couronnes. Au dos de ce billet, un paysage de Bohuslän et une fleur de chèvrefeuille des bois.
L’actrice universalement connue, Greta Garbo (1905-1990), trônera sur les billets de 100 couronnes avec une vue de Stockholm au dos. (Stockholm fait partie de l’Uppland, dont la fleur est la fritillaire pintade mais celle-ci ne figurera pas sur le billet de 100 kr.)
Ingmar Bergman (1918-2007), le metteur de scène de théâtre, scénariste et réalisateur suédois le plus connu au monde, a été choisi pour le nouveau billet de 200 couronnes. Il décéda sur sa chère île de Fårö [faureu], située en mer Baltique, au nord de la grande île Gotland, qui figure au recto de ce billet, avec le lierre grimpant.
La soprano Birgit Nilsson (1918-2005) n’est peut-être plus aujourd’hui aussi connue hors les frontières suèdoises, mais elle eut sa période de gloire entre les années 1950 et 1970 et donna sa voix aux rôles d’Elektra, Salomé, Isolde, Tosca, Aïda et bien d’autres. Au dos de son billet de 500 couronnes : sa région d’origine, la Scanie, avec le pont d’Öresund reliant Malmö à Copenhague, et la marguerite commune.
Enfin, sur le billet de 1 000 couronnes, on verra le portrait du diplomate Dag Hammarskjöld (1905-1961), mort dans un accident d’avion, en Afrique, alors qu’il était secrétaire général des Nations Unies. On lui décerna le prix Nobel de la paix à titre posthume, la même année. Pourquoi on a choisi la Laponie et sa fleur, la dryade à huit pétales, pour le recto de ce billet, je l’ignore ; je ne vois aucune relation entre la Laponie et Dag Hammarskjöld, qui, comme Astrid Lindgren, était originaire du Småland.
Le projet gagnant porte le nom de « Kulturresan » (= Le voyage culturel) et a été dessiné par Göran Österlund, designer et graveur. Le jury considère cette participation au concours comme cohérente avec des recto et verso qui interagissent de manière claire et harmonieuse. Les portraits s’adapteront facilement à la gravure. Les motifs au verso sont typiques des paysages. L’impression générale est celle d’une belle série de billets parfaitement équilibrée entre innovation et tradition. Les chiffres des valeurs sont jugés intemporels et facile à lire, clairement différenciables.
Les autres projets proposés dans le cadre de ce concours suivent bien sûr les mêmes choix de personnalités et de paysage, mais la forme graphique varie énormément. Ma série préférée s’intitule « Natur och kultur i symbios » (= Nature et culture en symbiose, dessiné par Ali Tabatabai de WEM3 et par Mads Quitsgaard de PLEKS, deux bureaux de design danois) qui ose la forme verticale et des couleurs franches. Mais le jury a trouvé qu’il n’était pas suffisamment facile de différencier les valeurs, que le format vertical des portraits au recto et horizontal des paysages au verso engendrait une certaine inconséquence et que le placement des chiffres des valeurs n’était pas pratique pour ce qui est de la manipulation des billets.
Les autres projets s’intitulent : « Alskäde aktörer » (= Chers acteurs, dessiné par Hans Cogne, designer et professeur de design à Konstfack, Clara Terne, illustratrice et Lars Sjööblom, graveur et designer) :
« Aurora Borealis » (dessiné par Göran Dalhov, artiste et architecte) :
« Det avlånga landet » (= Le pays allongé, dessiné par Stockholm Design Lab, avec Björn Kussofsky, Per Carlsson et Martin Mörck) :
« Inspiration 2012 » (dessiné par Sirje Papp, designer, et Vince Reichardt, artiste) :
« Kultur i blom » (= Culture en fleurs, dessiné par Lars Arrhenius et Martina Müntzing, tous deux artistes) :
et « Nära i bild » (= Portraits intimes (?), dessiné par Gustav Granström et Oscar Laufersweiler, tous deux designers de Ritator et Peter Johansson, artiste) :
De nouvelles pièces seront aussi mises en circulation en même temps que les nouveaux billets. À part la pièce de 10 couronnes qui restera inchangée, les autres seront plus petites que celles d’aujourd’hui et on introduira une pièce de 2 couronnes. Il est de tradition que le profil du chef d’état suédois, c’est-à-dire le roi, soit gravé sur les pièces suédoises et la Banque de Suède a choisi de s’y tenir.
À partir du 4 mai, on peut visiter une exposition sur les nouveaux billets suédois au Cabinet Royal des Monnaies, voisin du Palais Royal, à Stockholm.
et toujours pas des euros ? ah la la ces suédois ,-)
@denis : J’imagine que s’ils investissent pour de nouveaux billets, c’est que l’euro est encore loin de devenir la monnaie suédoise …